Claire Berest : "La banalité est tout le temps prête à exploser" (2024)

Grand Prix des lectrices de Elle pour son roman sur Frida Kahlo, Claire Berest livre en cette rentrée un roman très noir pour une plongée dans l’esprit malade d’un homme sur le point de commettre l’irréparable. L’autrice revient avec nous sur le roman de sa vie, et ce qui nourrit son écriture.

Avec

  • Claire Berest Écrivaine

Romancière prolifique depuis son entrée en littérature en 2011 avecMikado, Claire Berest a d’abord nourri ses premiers opus de sa vie romanesque, avant d’aller vers des livres qui s’intéressaient au réel, avec les essais La lutte des classes: Pourquoi j'ai démissionné de l'Éducation nationale et Enfants perdus, puis de se consacrer à des personnes ayant réellement existées. En 2017, elle co-signe avec sa sœur Anne Berest un ouvrage consacré à Gabriële Buffet Picabia, leur arrière-grand-mère, dont elles retracent le rôle essentiel dans les avant-gardes. C’est ensuite son icône Frida Kahlo que Claire Berest raconte, dans Rien n’est noir, paru en 2019. Artifices, son huitième opus, paru en 2021, semble quant à lui avoir ouvert un nouveau chapitre, davantage fictionnel, dans lequel s’inscrit son dernier roman, L'Épaisseur d'un cheveu, paru chez Albin Michel. A l'occasion de sa parution, la romancière revient, le temps d’un grand entretien, sur son itinéraire dans la littérature et nous ouvre les portes de ses imaginaires.

La nécessité de raconter des histoires

En pleine fac de lettres, elle décide de partir sur un coup de tête- et de cœur- avec son amoureux de l’époque ( le musicien Buck 65) à New-York.Sesdeux premiers romans,Mikado (2011) et l’Orchestre vide ( 2012)sontinspirés de ces années-là: "Je n’ai écrit quasiment que de la fiction. Mais dans ce livre, Orchestre vide, je relate ce moment de ma vie un peu fou. Pour moi, la banalité est toujours prête à exploser.Pour moi, le romanesque est partout, tout le temps. J’adore cette idée qu’on peut se lever un matin et changer absolument de direction dans l'après-midi. Mon départ à New York s'est décidé en une heure. C’est pour cela que le thème de la bascule est très présent dans mon écriture."

L'art: son refuge et son inspiration

Elle partage aussi son amour pour les musées: "J’ai rarement trouvé autant d'apaisem*nt que lorsque je m'assieds dans une salle de musée pour dessiner ou lire. Malheureusem*nt, on ne peut pas manger dans les musées. Peut-être qu'il faudrait lancer un appel à la ministre de la Culture? Les musées devraient être un lieu de sociabilité. Quand on s’assoit dans un musée les œuvres s'infiltrent en nous comme du liquide. On passe du temps avec elles, comme avec des personnes. Il ne faut pas les rendre trop poussiéreuses ou inaccessibles. Elles doivent faire partie de la vie. Et je pense que c'est pour ça que j'y fais souvent référence dans mes textes, mais ce n'est même pas voulu de ma part!"

L’écriture comme devoir de sortir de soi

Claire Berest évoque ainsi le devoir de décentrement et de réalisme qu'elle perçoit dans l'écriture: "Dans notre époque, on questionne beaucoup d’où l'écrivain parle: est-ce qu'on peut se mettre dans la peau de quelqu'un qui n'a pas la même nationalité que nous? De quelqu'un qui est porteur de handicap? En revanche, là où je tranche, c'est qu'un écrivain doit écrire sur tout le monde. Hommes, femmes, toutes couches sociales, toutes cultures. Je pense que c'est même de son devoir de sortir de lui-même. Mais à une condition très importante: respecter la justesse. C'est-à-dire que si on parle de quelqu'un dont on ne peut pas s'inspirer de notre propre expérience, il faut beaucoup travailler."

Plus d'informations sur son actualité:

  • L'Épaisseur d'un cheveu, le dernier roman de Claire Berest, a paru chez Albin Michel. Il figuredans la sélection de rentrée littéraire France Culture l’Obs.
    Présentation de l'éditeur: "Etienne est correcteur dans l’édition.Avec sa femme Vive , délicieusem*nt fantasque, ils forment depuis dix ans un couple solide et amoureux . Parisiens éclairés qui vont de vernissage en concert classique, ils sont l’un pour l’autre ce que chacun cherchait depuis longtemps.Mais quelque chose va faire dérailler cette parfaite partition.Ce sera aussi infime que l’épaisseur d’un cheveu, aussi violent qu’un cyclone qui ravage tout sur son passage.Implacable trajectoire tragique, L’Épaisseur d’un cheveu ausculte notre part d’ombre. Claire Berest met en place un compte-à-rebours avec l’extrême précision qu’on lui connaît pour se livrer à la fascinante autopsie d’un homme en route vers la folie.

À réécouter : Pourquoi Frida Kahlo privilégiait-elle les autoportraits ?

Sans oser le demander

57 min

À réécouter : Gabrièle Buffet-Picabia

L'Art est la matière

59 min

Sons diffusés pendant l'émission:

  • Anne Berest dans Affaires Culturelles le 8 septembre 2021, au moment de la sortie de son livre “La Carte Postale”.
  • Le choix musical de l'invitée: “Ma môme” deJean Ferrat
  • Gisèle Freund qui parle de sa rencontre avec Frida Kahlo, archive diffusée dans Les Nuits magnétiques, France Culture, mercredi 21/01/1987.
  • Isabelle Pasquier dans le Journal de 07h00 sur France Inter le vendredi 13 mai 2022, à proposdu procès qui a opposé l’artiste Maurizio Cattelan au sculpteur Daniel Druet.
  • Le poème "Après trois ans", de Verlaine, interprété par Michael Lonsdale, sur France Culture, en 1977.

À réécouter : Anne Berest : "Dans chaque famille, le silence dessine une forme"

Affaires culturelles

58 min

Le Son du Jour:un extrait de “La voix humaine”, de Francis Poulenc et Jean Cocteau, par Julie Cherrier Hoffman.

"Alors voilà... j'allais dire machinalement - à tout de suite" : c'est le titre de notre son du jour. Un album: La voix humaine, fiançailles pour rire. Un compositeur: Francis Poulenc. Un auteur: Jean Cocteau. Une soprano: Julie Cherrier Hoffmann. Et un orchestre: L'Orchestra del Teatro La Fenice di Venezia, dirigé ici par Frédéric Chaslin.
Alors voilà, nous vous disons machinalement: à tout de suite.

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